Après un long parcours en entreprise, cet ancien de l’Insead a fondé À Table for Two, une start-up dédiée à la gastronomie.
Dans les jardins de L’Appartement, ils sont une vingtaine de curieux à être venus à l’invitation de À Table for Two, la jeune start-up du non moins trépignant Antoine Abou Samra. Ce soir, l’ancien patron de Bader Young Entrepreneur Program y reçoit Rita Khoury, la directrice commerciale d’Adyar, le domaine vinicole fondé au début des années 2000 par l’ordre des moines maronites.
Ce n’est pas la première fois que le quarantenaire accueille un as de la gastronomie en ce lieu un rien excentré. Il y a quelques semaines, c’était les fondateurs de Château Qanafar qui se prêtaient à l’exercice.
Dans quelques semaines, cela pourrait être un chef français installé à Beyrouth depuis plusieurs années.
À chaque fois, le concept est le même : il s’agit d’aller à la rencontre d’hommes et de femmes attachés à leur terre et aux produits dont ils parlent avec simplicité et passion. Et, bien sûr, de déguster avec délectation les fruits de leur labeur. «Si on comprend leur parcours, on comprend mieux leurs produits, résume Antoine Abou Samra. Moi je me demande si un jour on pourra reconnaître un vin libanais comme on devine un vin français ou italien. Pas vous?»
L’événement est filmé, un podcast est même réalisé pour en assurer la pérennité sur les réseaux sociaux. «Ces rendez-vous à L’Appartement me permettent de tester le concept», avance-t-il.
Antoine Abou Samra ne fait pas son beurre de ces rencontres gourmandes, d’autant que, crise oblige, les Libanais n’ont guère le porte-monnaie à la fête. «Lorsque j’ai construit mon business-plan, il était beaucoup plus ambitieux. Je voulais créer une agence d’événementiels spécialiste de la gastronomie : j’envisageais d’organiser des dîners dans des lieux insolites ou de prestige ; des émissions de télévision pour aller à la rencontre de chefs, des rencontres avec des producteurs… La crise m’a obligé à réduire la voilure. Aujourd’hui, je couvre juste mes frais.»
À défaut de lisibilité quant au marché libanais, l’entrepreneur démarche déjà les marchés du Golfe. «La régionalisation était de toutes les façons inévitable. Le Liban est un marché trop petit.»
Avec dans sa ligne de mire : l’Arabie saoudite où “l’ouverture culturelle” a permis à nombre d’initiatives de voir le jour, notamment gastronomiques.Cet ancien de l’Insead ne veut pas en démordre. Malgré le contexte économique, «À Table for Two doit marcher».
S’il s’acharne, c’est qu’il voit dans sa jeune pousse l’aboutissement d’une carrière déjà bien remplie. «En chemin, je me suis peut-être un peu perdu», s’amuse-t-il. Comme si les différents emplois qu’il avait assumés, les entreprises qu’ils avaient créées ou dirigées l’avaient mené jusqu’à ces rivages culinaires.
«La vocation, c’est d’avoir pour métier sa passion», disait Stendhal. «Je n’ai pas forcément besoin de passion, mais j’ai besoin de sens. Mon métier doit m’épanouir.»
On ne sera donc pas surpris d’apprendre qu’il a largué il y a un an son poste de PDG d’une PME d’une centaine de salariés pour fonder son propre projet. «Le corporate, ce n’est pas moi. Je veux pouvoir faire quelque chose qui me plaît. C’est fondamentalement gratifiant.» Difficile de dire le contraire, surtout quand on sirote un verre de vin.