Le problème – Mademoiselle R. est propriétaire d’un magasin d’habillement de luxe récemment ouvert à Beyrouth. Elle a engagé il y a un mois une couturière afin d’effectuer des retouches et l’ajustement des vêtements aux mesures des clientes. Celle-ci travaille au magasin aux heures d’ouverture. Elle est payée à la pièce, car la propriétaire lui permet d’effectuer à ses heures libres son propre travail pour le compte de ses clientes personnelles. Elle aimerait savoir si la couturière a le statut de salariée et si elle doit l’inscrire à la CNSS (Caisse nationale de la Sécurité sociale).

Le conseil de l'avocat – Le fait que la couturière soit payée à la pièce n’exclut pas la qualification de contrat de travail. Ainsi, l’article 47 du code du travail prévoit expressément le travail à la pièce et le mode de rémunération d’un tel travail. Pour la jurisprudence, le contrat de travail est caractérisé par trois éléments : l’exécution d’un travail, le versement d’une rémunération (qu’elle soit versée en argent ou en nature, qu’elle soit calculée au temps, aux pièces ou à la commission) et la subordination juridique.
Selon la jurisprudence, la subordination juridique se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Ainsi, dans une affaire similaire, les tribunaux libanais ont décidé qu’un artisan qui travaillait à la pièce au chantier sous les directives et la supervision de l’entrepreneur est considéré comme étant un salarié, même si l’entrepreneur se montrait permissif vis-à-vis de ce dernier pour certains travaux qu’il exécutait pour son propre compte. Les tribunaux ont conclu à l’existence d’un lien de subordination, ce qui les a conduits à la reconnaissance d’un contrat de travail (Conseil arbitral de Beyrouth – n° 422 du 28/3/1967, Hatem – 72 – p. 27). En revanche, dans une autre affaire où une couturière effectuait les travaux à la pièce à son propre domicile, les tribunaux ont considéré qu’il n’y a pas de lien de subordination, car la couturière ne travaille pas sous la supervision et l’autorité d’un employeur selon un horaire fixé par ce dernier, et par conséquent aucun contrat de travail ne lie les deux parties (juge unique de Beyrouth, n° 1241, du 20/6/1956, revue judiciaire, 1957, p. 626).


Tenue de l’assemblée générale à l’étranger

Le problème – Monsieur J. est actionnaire et président-directeur général d’une société anonyme libanaise (SAL). Les deux autres actionnaires sont installés à Paris depuis près d’un an en raison de la situation précaire au Liban. Or, il doit lui-même se rendre dans un mois dans la capitale française pour du travail. Peut-il convoquer les autres actionnaires à une assemblée générale ordinaire annuelle à Paris, ou une telle réunion doit-elle se tenir obligatoirement au Liban ?

Le conseil de l'avocat – Le code de commerce libanais ne spécifie pas expressément le lieu de réunion du conseil d’administration ni celui de l’assemblée générale. Toutefois, selon les tribunaux libanais, les réunions doivent se tenir en principe au siège social. Mais cette règle n’est pas obligatoire, car les statuts de la société peuvent prévoir un autre lieu de réunion. De même, la majorité des actionnaires peut déroger exceptionnellement à cette règle si les circonstances justifient un tel changement. Le changement du lieu de réunion est donc exceptionnellement admis à condition que cette décision ne soit pas abusive, car la tenue d’une réunion dans un autre lieu ne doit pas apparaître comme une manœuvre destinée à écarter certains actionnaires.